Femmes du Sahel : piliers de la résilience et du développement 

Ce 8 mars, la Journée internationale des droits des femmes coïncide avec le 30ᵉ anniversaire de la Conférence de Beijing, un tournant majeur pour l’émancipation des femmes à travers le monde. Mais à seulement cinq ans de l’échéance des Objectifs de Développement Durable (ODD) fixés par l’O.N.U, les inégalités persistent.

Des initiatives porteuses d’espoir

Chaque matin, des milliers de femmes sahéliennes entament une longue journée de travail. Elles cultivent, transportent l’eau, s’occupent de leurs enfants et animent les marchés locaux. Indispensables, elles assurent la survie de leurs familles et la transmission des savoirs agricoles qui permettent aux communautés de s’adapter au changement climatique. Cependant, elles restent parmi les plus précaires, privées d’un accès équitable à la terre, aux financements et aux formations.

Face à ces défis, SOS SAHEL œuvre pour offrir aux femmes les moyens de développer des activités économiques durables. Par exemple, au Burkina Faso et au Mali, l’organisation a accompagné plus de 11 000 productrices de beurre de karité grâce à des formations techniques et la mise en place de filières certifiées, biologiques et équitables. Ces initiatives ont permis d’augmenter leurs revenus jusqu’à 80 %, leur offrant une plus grande autonomie financière tout en contribuant à la préservation des arbres de karité, essentiels à l’écosystème sahélien.

Au Tchad, l’exploitation de la gomme d’acacia constitue une opportunité de développement pour les femmes. Traditionnellement récoltée de manière rudimentaire, cette ressource précieuse est mieux valorisée grâce aux formations et équipements fournis par SOS SAHEL.

Aujourd’hui des femmes comme Fatimé Doungou, cueilleuse de gomme arabique multiplient leurs revenus par quatre et peuvent ainsi mieux nourrir leur famille : “SOS SAHEL nous accompagne dans nos activités d’exploitation de gomme arabique. Par le passé, nous souffrions beaucoup de problèmes d’eau potable, de bois de chauffe. Nos gommerais mouraient à cause de la désertification. La gomme cueillie était sale, le rendement obtenu de la gomme n’arrivait pas à satisfaire nos besoins. Aujourd’hui, grâce aux formations, au matériel et aux infrastructures, le revenu issu de la gomme nous permet de scolariser nos enfants, d’acheter de la nourriture et donner un peu à nos maris pour les activités de petit commerce.”

SOS SAHEL encourage également les initiatives locales pour promouvoir des cultures résilientes face aux changements climatiques. Des programmes de maraîchage et d’agriculture durable voient le jour, permettant aux femmes de diversifier leurs sources de revenus tout en préservant les ressources naturelles.

Productrice de gomme arabique au Tchad, SOS SAHEL
Productrice de gomme arabique au Tchad, SOS SAHEL

Créer son activité, chemin vers l’indépendance

Des dispositifs de microcrédit sont mises en place pour permettre aux femmes de financer leurs projets et de lancer de petites activités génératrices de revenus.

Ainsi, de nombreuses initiatives émergent comme le développement d’ateliers de transformation agroalimentaire. La production et la vente de confitures, de jus naturels et de céréales améliorées permettent à des milliers de femmes de se structurer en petites entreprises et d’assurer une meilleure stabilité financière à leurs familles.

Parfois, la sensibilisation et l’accompagnement dans l’utilisation des technologies numériques permettent à certaines entrepreneuses d’accéder à de nouveaux marchés et d’accroître leur visibilité. Grâce aux plateformes de vente en ligne, certaines femmes commercialisent leurs produits au-delà des frontières du Sahel, augmentant ainsi leurs revenus et favorisant le développement économique de leur région.

D’autres initiatives voient également le jour pour encourager les femmes à se réunir pour former et gérer des coopératives. C’est le cas de l’Union des Groupements de Productrices des Produits du Karité de la Province du Houet au Burkina Faso. Ce groupement 100 % féminin produit du beurre de karité de qualité supérieure et certifié. En intégrant des formations en gestion et en marketing, ces travailleuses améliorent leur compétitivité sur les marchés locaux et régionaux. Elles génèrent des revenus stables et durables, qui bénéficient directement à leurs communautés.

Marché alimentaire au sud du Sénégal, Nick Holt
Marché alimentaire au sud du Sénégal, Nick Holt

Quatre femmes à travers le Sahel

Lakeshi Bakele, une jeune éthiopienne de 27 ans, illustre parfaitement la réussite des initiatives de SOS SAHEL. Responsable d’une pépinière, elle dirige une équipe qui travaille six jours par semaine à la production d’arbres destinés au reboisement. Malgré son jeune âge et les défis liés à sa position de femme dans un environnement rural, elle est aujourd’hui respectée et reconnue pour ses compétences. Son engagement contribue non seulement à la régénération des terres, mais aussi à la prospérité de sa communauté.

Fatouma Mohamed Soumbourou, éleveuse de caprins à Djibouti, témoigne également de l’impact des programmes de soutien aux femmes. Grâce à une mini-ferme collective mise en place par SOS SAHEL, elle a non seulement sécurisé une source de revenu stable, mais elle a aussi acquis une indépendance précieuse. L’élevage caprin lui permet de nourrir ses enfants et d’améliorer ses conditions de vie.

Sita Coulibaly, présidente de la coopérative des productrices de karité de Bougoula, au Mali, a vu sa vie transformée. Les noix de karité, aussi appelées « or blanc », sont travaillées depuis des lustres par les mains expertes des femmes pour produire un beurre précieux. Avant cette initiative, les femmes de son village travaillaient dans des conditions rudimentaires et vendaient leur beurre de karité à bas prix. Dans le cadre de « l’opération Karité » de SOS SAHEL, elles ont pu s’équiper et s’organiser pour produire un beurre de meilleure qualité et le vendre à des prix plus élevés, améliorant ainsi leur statut social et leurs conditions de vie. Cette initiative a permis à Sita et aux autres productrices de vivre dignement de leur travail, de scolariser leurs enfants et de devenir des membres respectés de leur communauté.

Koula Moutta enfin, a vu sa vie s’améliorer durant le moment le plus critique de l’année pour des millions de Sahéliennes et Sahéliens : la période de soudure. Une période propice à la faim. En effet. dès le mois de juin, la récolte précédente est déjà épuisée pour beaucoup d’agriculteurs sahéliens. Pendant ce temps très difficile, il faut pourtant cultiver son champ, même le ventre vide, et attendre la saison d’abondance qui ne viendra pas avant le mois d’octobre. Auparavant, durant cette saison d’abondance, Koula et les autres productrices, ne disposant pas de moyens de stockage, étaient obligées de vendre leur récolte rapidement. L’excès de l’offre sur les marchés locaux faisait chuter les prix et menaçait les moyens de subsistance de nombreuses familles. Grâce à des « magasins warrantages », les agricultrices ont stocké leurs produits agricoles en échange d’un crédit qui les a fait vivre durant la période de soudure. Elles ont ensuite revendu à de meilleurs prix lors de la saison basse. Ainsi, Koula a pu dégager un meilleur revenu qui lui a permis non seulement de rembourser son crédit, mais aussi d’en tirer un bénéfice.

Koula Moutta en témoigne : « Généralement, durant la période de soudure, nous nous attendons au pire. Mais grâce au soutien de SOS SAHEL, nous avons pu stocker cette année 350 sacs d’oignons et 20 sacs d’ail. L’an dernier, nous avons pu revendre notre production quelques mois plus tard quatre fois plus cher qu’au moment de la récolte. Ce bénéfice nous a permis d’épargner et d’investir pour améliorer notre production. Nous avons même pu payer les frais de scolarité de nos enfants et les frais de santé de nos familles ! Nous pouvons dire que la période de soudure est un mauvais souvenir pour nous, grâce à l’appui de SOS SAHEL. »

Ces témoignages de femmes sahéliennes montrent la diversité des parcours et la richesse des savoir-faire féminins. Ils illustrent l’impact positif de l’autonomisation économique des femmes et la promotion de l’égalité des genres à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes.

Productrice du sud du Sénégal, Nick Holt
Productrice du sud du Sénégal, Nick Holt

Un avenir à bâtir ensemble

Les actions de SOS SAHEL en faveur des femmes sahéliennes montrent que l’égalité des genres n’est pas seulement une question de justice sociale, mais aussi un axe essentiel pour le développement durable. En leur donnant les moyens de créer leur activité, d’accéder aux ressources et de valoriser leur travail, nous contribuons à renforcer la résilience de toute une région. 

À l’occasion de cette Journée mondiale des droits des femmes, nous appelons chacun à soutenir ces initiatives et à reconnaître le rôle crucial des femmes sahéliennes dans la construction d’un avenir plus prospère et équitable pour tous. 

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