À l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, SOS SAHEL met en lumière, tout au long du mois de mars, les productrices des cultures oubliées sahéliennes, véritables moteurs du changement local.
« La culture du fonio est plus qu’une activité pour moi. Sa culture remonte à mes ancêtres et elle est gravée en moi »
Marie Madeleine Bindia, productrice de fonio dans la région de Kédougou
De nombreuses céréales autrefois largement cultivées, ont été marginalisées au profit de trois grandes céréales modernes : le blé, le riz et le maïs. Les espèces dites oubliées ou indigènes sont pourtant généralement mieux adaptées aux conditions climatiques actuelles et nécessitent moins de ressources en eau. A l’image du fonio, ces cultures oubliées sont nombreuses au sein du paysage agricole africain. Appelé « po » dans la langue dogon malienne, soit la « graine de l’univers », le fonio est une céréale cultivée au Sahel, riche en magnésium et en fer, et sans gluten. Sa popularité grandissante à l’international fait face à de nombreux défis en raison du traitement de ces petites graines qui nécessitent un travail considérable.
Au Sud-est du Sénégal, la région de Kédougou, pourtant parmi les plus riches en ressources naturelles, est la seconde région la plus touchée par l’insécurité alimentaire. Grâce à ses vertus nutritives, le fonio, élément essentiel de l’alimentation locale depuis des générations, reste au cœur des traditions culinaires. Les femmes jouent un rôle essentiel dans la production et récolte en perpétuant des pratiques traditionnelles qui exigent un processus long et intense, du champ à l’assiette.
La récolte du fonio implique un travail physique conséquent, comprenant le labourage de la terre et la plantation des semences. Ce travail est généralement réalisé en communauté, comme l’illustre le récit de Marie-Madeleine :
« J’ai été dans 2 villages pour que les gens m’aident à récolter le fonio, je suis partie de famille en famille et des personnes sont venues pour m’aider de 8h à 17h, pour travailler la charrue et retourner la terre sur toute ma parcelle. »
Le processus de traitement du fonio est une tradition au sein des communautés de la région de Kédougou. Le battage par exemple est une technique où le fonio est piétiné pour séparer les graines des tiges, avant de passer au décorticage et procéder au nettoyage à travers différentes étapes de tamisage pour obtenir un fonio propre. Prêt à être consommé, le fonio est utilisé dans les plats traditionnels tels que le yassa ou le mafé et peut être même transformé en desserts comme le thiakry ou des bonbons.
Investir dans la modernisation et professionnalisation des productrices de fonio
Depuis 3 ans, SOS SAHEL s’engage auprès des productrices de fonio au Sénégal pour améliorer les techniques de production et valoriser cette ressource. Grâce à nos équipes d’experts et en collaboration avec les organisations de producteurs et associations locales, les femmes se réapproprient leurs cultures et sont les premières impliquées dans la modernisation du traitement du fonio. L’accès à la mécanisation et à des formations au sein des centres de services agricoles dans la commune de Dar Salam a contribué à augmenter la production et les rendements. Ici, 72% des producteurs formés, sont des productrices qui se sont portées volontaires pour développer des compétences dans la filière du fonio. Le premier impact pour les productrices étant le gain de temps considérable, passant de trois jours de temps de traitement à quelques heures.
Un festival pour remettre les cultures oubliées sous le feu des projecteurs !
SOS SAHEL co-organise la première édition du « Lost Crops Festival » ou Festival des Cultures Oubliées à Dakar les 27, 28 et 29 juin prochains. Initié par le célèbre chef cuisinier sénégalais Pierre Thiam et le CIRAD, cet évènement célébrera l’authenticité humaine, artistique et culinaire en mettant en valeur les cultures africaines oubliées auprès de la nouvelle génération de consommateurs. SOS SAHEL s’associe à ce festival qui offre une opportunité exceptionnelle de mettre en lumière la contribution essentielle des productrices, permettant de partager leurs expériences et savoirs.