Alizèta Ouedraogo et Fihima Mohamed, 2 championnes de la Grande Muraille Verte !
Alors que les pays du Sahel sont particulièrement impactés par le changement climatique, les femmes se mobilisent pour réaliser la Grande Muraille Verte. Leur engagement est aussi un fait marquant pour l’avancée des droits des femmes.
Deux femmes, deux parcours parallèles et un même combat pour les droits des femmes
Alizèta Ouedraogo est la présidente de la Société coopérative (SCOOP) Song taaba, créée il y a 5 ans, dans le cadre du projet Beog Puuto, « les Champs de l’avenir » mis en œuvre par SOS SAHEL au Burkina Faso. « Song taaba signifie « entraide » mutuelle », explique Madame Ouedraogo. Song taaba regroupe aujourd’hui 119 productrices et transformatrices de moringa du village de Tengressinin dans la commune de Korsimoro au Centre Nord du pays ». Ses qualités humaines et son leadership lui ont valu d’être élue conseillère municipale en 2017.
Fihima Mohamed est la présidente de Women Initiative Djibouti, créée il y a 5 ans également : « La coopérative est 100% féminine. Elle réunit 37 productrices. Son mandat : préserver les ressources naturelles et l’environnement, réduire la pauvreté et soutenir l’entreprenariat des femmes. »
Au Burkina Faso et en République de Djibouti, tout comme dans l’ensemble des pays du Sahel, deux habitants sur trois vivent de l’agriculture et de l’élevage. Or les Sahéliens et les Sahéliennes sont parmi les populations les plus affectées par le changement climatique. Sous l’effet des dérèglements du climat (sécheresses et pluies irrégulières entrainant des inondations), la fertilité des terres et les zones de pâturages se dégradent.
En restaurant massivement les terres en région sahélienne, la Grande Muraille Verte doit permettre d’inverser la tendance sur le phénomène vicieux de la dégradation des terres. Dans ce contexte, les initiatives des sociétés civiles se multiplient. Les femmes en particulier se mobilisent et font ainsi avancer leurs droits.
Des terres pour les Sahéliennes !
Au Burkina Faso et en République de Djibouti, les femmes n’ont pas facilement accès à la propriété foncière. « L’accès à la terre pour les femmes est un défi constant à relever, quel que soit le projet. Au Burkina Faso, les femmes ne possèdent pas de terres, celles-ci appartiennent à leur père et leur mari. », explique Chantal Ouedraogo, spécialiste genre à SOS SAHEL sur le projet Beog Puuto.
Dans le cadre de Beog Puuto, l’octroi de terres aux femmes demande toujours une phase préliminaire de sensibilisation des hommes. L’expérience de la SCOOP Song Taaba est un bel exemple de réussite. Travailler avec les leaders communautaires et s’organiser en groupements favorisent l’accès à l’usage du foncier. Le chef du village a ainsi attribué aux femmes 2,5 hectares de terres. « Elles ont pu réaliser des activités agricoles génératrices de revenus comme le reboisement par contrat et la production, la transformation et la commercialisation de produits à base de moringa et de produits forestiers non ligneux. A ce jour, 15 000 plants de moringa et 3000 plants de baobab ont été plantés. Les femmes cultivent ces terres et le fruit de leur travail leur revient directement » s’enthousiasme Alizèta Ouedraogo
« A Djibouti, nous restaurons des terres dégradées et les offrons gracieusement à des femmes afin qu’elles les exploitent de manière durable, en pratiquant le maraichage et l’arboriculture. » explique Fihima Mohamed. En zone urbaine, les parcelles agricoles sont généralement mises en vente par l’Etat. Dans la majorité des cas, les femmes n’ont pas la capacité financière d’acquérir ces parcelles. La coopérative Women Initiative Djibouti s’est donc saisie de cette question. »
En collaboration avec les autorités, l’association récupère des terres dégradées et abandonnées, les restaure avant de les offrir à des productrices qui peuvent ensuite les exploiter. Elles doivent s’engager pour une gestion durable et écologique des terres. En 3 ans, 30 ha de terres dégradées ont été restaurés dans le cadre du programme « Plantons l’espoir ». Cette initiative pilote dans la capitale djiboutienne a été un succès : « Aujourd’hui, des centaines de femmes viennent toquer à notre porte car elles souhaitent la même opportunité ! » souligne Fihima Mohamed.
Des revenus pour les Sahéliennes
Au Burkina Faso, les épouses travaillent pour le compte de la famille et les revenus générés sont gérés par les chefs de famille.
Dans le cadre de Beog Puuto, deux activités en particulier permettent aux femmes d’être rémunérées. Il s’agit du reboisement par contrat et des travaux à haute intensité de main d’œuvre (HIMO).
Dans le cas du reboisement par contrat, concept développé par SOS SAHEL pour responsabiliser les producteurs et les productrices, les personnes volontaires reçoivent un nombre de plants basé sur leur demande, et s’engagent par contrat à les planter et les entretenir sur au moins deux à trois ans. Au terme de cette période, les arbres bien entretenus sont comptés et une prime par plant leur est reversée. Encouragées et enthousiastes les femmes obtiennent des résultats considérables. Et 100% des bénéfices leur revient.
Concernant les travaux HIMO, c’est exactement le même principe basé sur le volontariat et la rémunération du travail. Même s’il s’agit majoritairement de travaux d’aménagements assez physiques qui nécessitent une forte main d’œuvre, les femmes sont volontaires. Elles sont attirées par la rémunération mais également par l’apprentissage qu’elles peuvent en tirer pour leur propre lopin de terre, notamment en matière de techniques de restauration des terres et de production agricole. Par ailleurs, les femmes ne se déplacent pas facilement faute de moyen de transport donc quand il y a des activités de proximité, elles sont motivées.
Ces deux initiatives ont permis aux femmes :
- de diversifier leurs revenus et d’améliorer leurs conditions de vie
- de participer plus activement au développement de l’économie locale
- de valoriser leurs travail, connaissances et savoir-faire
«En milieu rural si on exploitait tout le potentiel de développement économique des femmes, on aurait des résultats extraordinaires. Mais on ne valorise et ne comptabilise pas suffisamment leur travail. En réalité, au Burkina Faso, les femmes contribuent la moitié du PIB » conclut Guillaume Doulkoum, directeur pays de SOS SAHEL au Burkina Faso.
Mobilisons-nous aux côtés des Sahéliennes pour défendre avec elles leurs droits et soutenir leurs initiatives pour restaurer les terres dégradées et ainsi réaliser la Grande Muraille Verte !